jeudi, novembre 01, 2007

mercredi, octobre 31, 2007

Bela fou mouk, chouya…


Bela fou mouk, chouya…

Après avoir lâché un « dégueulasse » pour qualifier le gadget des tests ADN, Fadela Amara, secrétaire d’Etat à la Ville et au Logement, n’a pas été rappelée à l’ordre par un Sarkozy qui, de plus en plus ouvert, ne trouve rien à redire à ces propos de poissarde. C’est que l’ancienne animatrice de « Ni putes, ni soumises » (on reste toujours dans l‘élégance Grand Siècle) a un plan pour les banlieues, un plan qualifié de « fondateur » par sa petite cour.

Pour le présenter, Fadela Amara était, la semaine dernière, dans une de ces banlieues que l’on a baptisées, par une sorte d’inversion de sens, « sensibles ». Nous vous passerons les détails de cette visite, faite à la hussarde et émaillée de quelques promesses de circonstance.

Ce qui est plus intéressant, c’est que Fadela Amara, d’abord accueillie comme la fille prodigue et à quelques égards prodige, s’est trouvée confrontée aux réalités desdites banlieues. Alors que tout semblait bien se passer et que la secrétaire d’Etat pouvait envisager de rentrer sous les lambris dorés de son ministère en roulant des mécaniques : « Vous avez vu, moi j’y vais dans les banlieues et j’y suis bien reçue », elle s’est retrouvée entourée d’une bande de lascars à capuche.

Il y a eu un début de discussion. A peu près amène. Mais les choses se sont très vite gâtées, les lascars en question n’hésitant pas à interpeller Fadela et, au final, à copieusement l’insulter…

C’est alors que la jeune femme, qui n’a pas la langue dans sa poche et qui provoque l’admiration des BCBG du gouvernement, a lancé aux encapuchés :

— Bela fou mouk, chouya !

Ce qui, en arabe, signifie : « Fermez un peu votre gueule. » Un langage clair, net et précis. Mais qui pose quand même quelques questions. La harengère de service est secrétaire d’Etat dans un gouvernement français. Pas dans un gouvernement algérien (aucun ministre algérien ne se permettrait d’ailleurs de lancer en public un tonitruant bela fou mouk…). Elle n’est pas chargée, au motif qu’elle jaspine l’arabe dialectal, d’aller s’empoigner avec des perturbateurs dans une langue étrangère. Sauf à admettre que, dans ces banlieues-là, il faut, pour se faire entendre – et comprendre – parler arabe…

Ce bela fou mouk pourra paraître anodin et anecdotique aux observateurs distraits. Il nous semble, quant à nous, qu’il marque un véritable tournant dans la politique de l’Etat français. Par-delà l’exotisme fleuri de Fadela Amara, c’est un signe inouï – au sens propre du terme : jamais entendu – d’une situation devenue incontrôlable. Les policiers, les pompiers, les postiers et les hommes politiques en général, n’ont pas droit de cité dans ces cités. Et quand un membre du gouvernement y va, même protégé par son appartenance ethnique, il lui faut s’y imposer en employant une langue qui, officiellement au moins, n’est pas encore celle de la République française. En lançant son bela fou mouk, son « ta gueule », Fadela Amara a dit quelque chose. Et ce quelque chose est sans équivoque : nous ne sommes déjà plus chez nous.

ALAIN SANDERS